Le projet d’exposer une partie des dessins de ma collection aux Sertines, pour l’association Esox Lucius, s’est concrétisée sur la lenteur, par un système d’apprivoisement mutuel. Patrice Ferrari, lorsque la situation fut mûre, est venu à Marseille pour affronter la réalité de la collection, plus de sept cents pièces, impossible à voir en une journée.Pourtant, il choisit le nombre exact de dessins qui fut montré cette année aux Sertines, sans hésiter, mais en se demandant s’il n’y en n'aurait pas trop.
J’avais décidé de ne pas intervenir sur le choix ni sur l’accrochage et ainsi fut fait.J’y aurais fait sans doute intervenir des critères affectifs ou décalés (mon premier dessin, mon dernier, celui de l’artiste le plus jeune ou le plus vieux, celui qui m’avait coûté le plus cher et celui que j’avais eu pour une bouchée de pain).Rien de tout cela : par goût personnel et en pensant au public disparate qui est sien, un ensemble constitué de classiques et de modernes, de vieux artistes couverts de laurier et de jeunes se lançant dans la carrière, d’œuvres austères et d’autres folichonnes a vu le jour, inédit totalement, que je découvrais comme le public du Brionnais.
Il est bien rare de voir ses collections dans le cadre d’une maison à vivre, comme on ne peut le faire dans son propre appartement, comme on le rêverait : des dessins partout, dans l’escalier, dans la cuisine, dans tous les coins. Qui plus est dans un cadre rural avec des champs à vaches aux quatre coins cardinaux. Pourtant, le public était là, pour le vernissage, pour tous les jours d’ouverture, pour la petite conférence que j’ai donné un jeudi après-midi pluvieux. Les journaux mêmes étaient là, avec un nombre d’articles (six, je crois, ou plus) qu’on ne pourrait espérer dans une grande ville.
Quelques perplexités quand même, bien peu représentatives face à l’intérêt non feint de la plupart des visiteurs.Chose également inédite, chaque spectateurs avait sa visite commentée et l’on pouvait constater immédiatement quel était l’état d’esprit de la personne que l’on avait en face de soi.
Bref, une expérience curieuse, légèrement angoissante, obligeant à s’interroger à chaque dessin. Mais pas désagréable du tout. De vagues projets d’une autre collaboration se sont fait jour autour d’un filet de charolais. Pourquoi pas une partie de la collection de photographies, ou d’autres dessins.
On verra bien.
Fait à Marseille le 12 septembre 2005
François Bazzoli